vendredi 23 juin 2017

Clos de T : saut dans l'inconnu (2)


J'avais déjà employé ce titre l'année dernière pour parler des vins d'Even A. Bakke. Je ne peux que continuer à m'en servir, car si les vins sont différents de ceux dégustés en 2016, on est tout aussi dérouté, quand bien même l'effet surprise devrait être moindre. Même pour le "vieux routard" que je suis, on est dans le totalement hors norme, quelle que soit la cuvée. Non seulement ces vins impressionnent, mais surtout, ils émeuvent. Je me retiens, car je suis un homme, mais à plusieurs reprises, j'étais pas loin de chialer de bonheur...


Clos de T Blanc 2014 (13.50 €)

(Grenache 83 %, Clairette 17 %)

La robe est d'un or intense, proche de celle d'un liquoreux, mais sans larmes épaisses.

Le nez est riche, complexe et profond, sur des notes d'abricot séchés (sans sulfites), de miel, de pomme rôtie au beurre caramélisé, avec une petite pointe de safran et d'autres épices douces, un peu de fumé et de grillé, aussi. Un voyage à lui tout seul.... (servir à 14-15 ° pour l'apprécier)

La bouche est très ample, avec une matière finement veloutée, riche aromatiquement tout en restant aérienne,  mais surtout une tension de dingue reposant sur fine acidité traçante qui ne vous lâche pas de l'attaque jusqu'au delà de la finale. Une fois qu'elle vous prend à la gorge, vous êtes pris dans sa nasse arachnéenne. L'harmonie entre les différentes composantes touche au génie. Un vin pareil ne devrait pas exister.

La finale est un vrai bing-bang gustatif où tout se rejoint en un point microscopique pour exploser plus fort ensuite. Ceux qui n'aime pas les vins qui envoient grave, abandonnez. Ce vin n'est pas pour vous. Pour les téméraires, vous allez vivre une belle aventure !


Clos de T 2012 (11.95 €)

(85 % Grenache, 5% Syrah, 5% Carignan et 5% Cinsault 5%)

La robe est grenat translucide bien évoluée (reflets tuilés)

Le nez exhale ce que l'on appelait un bouquet, avec toute cette complexité due à l'élevage de près de 5 ans en fûts : cuir, fruits compotés, épices, notes balsamiques, garrigue...

La bouche est vive, tendue, enrobée par une matière dense et souple à la fois, de bonne ampleur, patinée par le temps. Comme avec le blanc, on retrouve ce mix sur le fil du rasoir entre richesse et tension, sans que jamais l'une l'emporte sur l'autre. 

La finale ne semble pas tout fait en place (mise en bouteille le mois dernier). Elle devrait se fondre et s'harmoniser. Mais déjà, à l'instar du vin précédent, elle a une belle énergie et une aromatique totalement décadente (notes perçues au nez, avec un fruit confit plus marqué) dans le sens où l'entend François Mitjavile. 


Grandes terres 2012 (24.90 €)

(100 % Syrah)

La robe est plus sombre que le précédent, avec une évolution moins marquée.

Le nez est assez captivant car envoyant des signaux contradictoires : opulence/sobriété, confit/fraîcheur, exubérant/profond. Tout ça à la fois. Si tu sers ce vin  à  l'aveugle à des amateurs. J'entends déjà les silences, les questionnements... Et le "p... y a du lourd, là...". Je pense que je partirais sur un Toscan, car on y retrouve cette fraîcheur balsamique que j'aime dans ces vins (menthol, ciste, pain d'épices, liqueur de fruits noirs...).

La bouche est d'une concentration ahurissante et en même temps pas lourde du tout. C'est droit et frais, séveux en diable. Là, pas de grande ampleur. Au contraire, votre bouche semble se rétracter et n'avoir qu'un mince (mais ultra concentré) filet qui s'écoule avec une énergie limite monstrueuse.

La finale prolonge ces sensations : puissante, mâchue, avec toujours cette énergie et cette concentration, mais totalement libérées. Dingue !


Liquidus mineralis (26.90 € les 50 cl)

100 % Grenache blanc (vin sous voile, millésimes 2008-2014)

La robe est entre l'or et l'orangé, très légèrement trouble.

Le nez fin et intense fait très jurassien : morille, curry, croûte de pain et de comté... 

La bouche est très ample, très douce et envahissante, te pénétrant totalement le moindre mm² de ton palais. On n'a rarement fait douceur plus persuasive (voire intrusive, même si l'idée est plus flippante). Il y a une grande fraîcheur naturelle même si aucune acidité ne semble ressortir. 

La finale est prégnante, avec une mâche intense, profonde, et une aromatique explosive. C'est sûr, faut aimer "le jaune" pour apprécier ce vin. Mais si c'est le cas, tu vas a-do-rer, l'ami (je me permets de te tutoyer : entre amateurs de jaunes, c'est la norme).  Ramené au prix du clavelin, ça donne 33.35 €. Pas si cher que ça, ce vin...

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