vendredi 30 août 2013

Ballade en granit majeur ... ou visite chez Jean-Claude Lapalu début juillet 2013

Un gros orage (sans grêle heureusement) m'avait précédé la veille au soir et dans la nuit avant mon passage. Les paysages "beaujolois" furent donc brumeux et gris. Jean-Claude et Julie Balagny allaient d'ailleurs "aux escargots" l'après midi, c'est vous dire...  Impossible de faire quoique ce soit dans les vignes et son personnel était employé à l'étiquetage et la mise en carton.




La vue devant son chai de stockage permet d'embrasser 3 appellations : Beaujolais Villages, Brouilly et Côte de Brouilly.



L'AOC Brouilly s'arrête selon Jean-Claude de manière arbitraire car pas de différence dans les sols du Beaujolais Villages contigu. Certains bas de pente en Brouilly auraient mérité plutôt l'AOC Beaujolais Villages mais bon...  encore un mystère de certains découpages de l'INAO.

Nous faisons un saut dans la parcelle la plus proche en Beaujolais Villages.



2013 se présente bien pour le moment. La floraison a échappé aux pluies et la fraîcheur a préservé les vignes des maladies cryptogamiques (mildiou, oïdium, black rot,...) . Retard végétatif de 2 à 3 semaines comme partout.



La construction du chai de vinification a permis de faire une coupe du sous-sol. Nous y voyons la couche d'arènes granitiques puis le socle de granite rose. Lors des travaux, Jean-Claude m'expliquait que chaque fissure de la roche était exploitée par les racines des vignes.


Le chai de vinification, spacieux, fonctionnel et aisé à nettoyer avec Jean-Claude Lapalu en prime !




Le pressoir "à l'ancienne" et sa sole de granite permettant une presse très douce


Les amphores de la cuvée avec son petit pressoir dédié


Le chai à barrique entièrement climatisé



Sur la route du Jura, une vue sur la "fameuse" Côte du Py en AOC Morgon .


jeudi 29 août 2013

Dans la famille Pico, je demande le père


Thomas Pico, avec son domaine Pattes-Loup s'est créé une belle réputation. Il faut dire qu'il présente des Chablis moins austères, moins bloqués par les sulfites. Sexy quoi. Et donc à l'antipode des Chablis classiques, soi disant minéraux. Mais il ne faudrait pas pour autant négliger le domaine familial, Bois d'yver, car il propose aussi des vins de grande qualité. A l'instar de Pattes-Loup, il est passé en bio. Et Thomas amène sa patte dans les vinifs. Bref, père et fils forment un duo efficace.



Voici comment se présente le 2012 du Bois d'Yver

La robe arbore un beau jaune brillant.

Le nez évoque les fruits blancs mûrs (pomme, poire), le pomelo et la craie humide.

La bouche est traçante, incisive, avec une belle rondeur. L'ensemble est équilibré et  aérien. Très beau jus, comme dirait Emmanuel Delmas ;-)

Finale sur une légère mâche calcaire, à la fois caillouteuse et citronnée, vraiment goûtue et persistante, miam !
Franchement, on se régale, et il n'y a pas besoin d'attendre moultes années pour l'apprécier. C'est déjà super bon maintenant !Ceci dit, avec quelques années de garde, il sera certainement plus complexe.


mercredi 28 août 2013

Mais qu'est- ce qu'il fait là, lui ?



Lui, c'est Arditi. Et il a écrit la préface de notre ouvrage Crus classés de Saint-Émilion , bientôt en vente à Vins étonnants (un bon mois, on va dire  – il n'est pas encore imprimé...). Il m'a appelé il y a deux jours pour me la lire et me demander si elle me plaisait. C'était assez surréaliste, seul dans l'entrepôt du site au milieu de mes cartons. J'ai écouté, ça m'a plu, et il l'a envoyé telle quelle (enfin plutôt, sa fille l'a scanné et me l'a envoyé par mail).

Vous pouvez la lire dans son intégralité dans le blog consacré à notre livre : ICI.

Sauf que le site ne fonctionne pas pour l'instant : la voici donc, dans sa présentation définitive 


lundi 26 août 2013

Roc blanc : ce qui est rare n'est pas forcément cher.


Les Ribes n'en font même pas mention sur leur site : à quoi bon parler d'un vin qui est en rupture une bonne partie de l'année  ? Il n'y a en effet que 480 bouteilles à vendre. L'assemblage est tout aussi rare, probablement unique en son genre, surtout du côté de Toulouse. Jugez plutôt : 10 % Viognier, 10 % Muscadelle, 40 % Chardonnay et 40 % Sémillon ! L'on comprend mieux pourquoi le vin est classé en "véritable vin de table de France pour la table" comme s'en moquent joyeusement les embouteilleurs . Le Roc blanc est vinifié et élevée en barrique, ce qui explique en partie sa belle couleur dorée, mais aussi son aromatique légèrement toastée.

La robe est donc d'un jaune doré intense.

Le nez tout aussi intense sur le miel, l'écorce d'orange confite, le beurre noisette, avec une touche grillée.

La bouche est fraîche, nette, avec une matière d'une grande richesse apportant du gras

La finale est expressive, encore marquée par l'élevage (amers un peu prononcés)


Un vin à acheter aujourd'hui pour l'encaver un an ou deux, histoire de digérer totalement l'élévage (déjà moins marqué qu'il y a quelques mois). Cela devrait faire une jolie bouteille à un coût minime puisqu'il ne coûte que 9 €. Elle devrait accompagner à merveille des Saint-Jacques ou une volaille crémées.


mercredi 21 août 2013

Opâle, la Moselle réinventée


Eric Texier adore les vins de Moselle dont la fermentation est stoppée aux alentours des 7 ° d'alcool, conservant ainsi des sucres résiduels. Il voulait produire le même type de vin avec le cépage blanc de sa région, le Viognier. Il y a juste un petit souci (en fait, deux) : alors que ces vinifications sont institutionnalisées en Allemagne, donnant naissance aux vins les plus réputés du pays, elles ne sont pas reconnues en France. En dessous de 10° d'alcool, les autorités considèrent que ça ne mérite pas de s'appeler "vin". On a trouvé un terme beaucoup plus sexy : "moût de raisin partiellement fermenté". Ça envoie, non ? 

Le deuxième souci, c'est que les vins traditionnels allemands sont bourrés de SO² pour bloquer la fermentation et éviter toute reprise de cette dernière. Or, Eric Texier n'est pas "sulfitophile". Il a donc choisi de le soumettre à une filtration stérile qui le débarrasse définitivement des levures et bactéries embarrassantes, limitant ainsi la dose de SO².

Le millésime 2012 d'Opâle a été vendangé mi-août 2012 à 10° potentiel. La fermentation a été stoppée par le froid ( 0 °C) lorsque le moût a atteint 6.5 % d'alcool. Il est filtré immédiatement et embouteillé pour préserver les arômes. Il reste 60 g/l de sucres résiduels, équilibrés par une acidité digne d'un Riesling mosellan : 9.5 g/l ( un Chablis fait environ 4.5 g/l...) 

La robe est jaune pâle (et pas trouble comme semble le laisser croire la photo ci-dessous : il y a de la buée !)

Le nez est charmeur, limite régressif, car il vous replonge en enfance avec un parfum de confiture d'abricot comme savait si bien la faire votre maman. Mmmmm...

Du coup, la bouche pure, cristalline, toute en tension, peut (agréablement !) surprendre. Notons un très léger gaz qui intensifie le frétillement des papilles.

On sent un peu de douceur en finale, mais on parierait plus sur 15-20 que sur 60 g par litre. C'est la sensation de fraîcheur qui domine, soulignée par une petite touche végétale. La persistance est plutôt limitée. On ne peut pas tout avoir ;-)

En tout cas, ce vin  moût a un très bel équilibre, donnant une idée de l'équilibre allemand, même si l'aromatique est totalement différente. En tout cas, il  rentre vraiment dans le cadre de notre mission de vous proposer des vins étonnants et respectueux de l'environnement. 


mardi 20 août 2013

Bulles de Syrah : un pari réussi !


Lorsque j'avais parlé du Blanc de Syrah de Denois, j'avais écrit : "avec cette vinosité, j'ai peut-être encore plus la sensation de boire un bon Champagne blanc de noirs sans bulles. D'autant que l'on ressent dans cette finale cette mâche que l'on a dans pas mal de Champagnes. Tiens, il faudrait que Jean-Louis Denois tente de faire une bulle 100 % Syrah"

Le lendemain, Jean-louis Denois nous envoyait un mail pour nous dire qu'il était effectivement en train de faire une bulle 100 % Syrah. Comme quoi, pour reprendre cette expression populaire "les grands esprits se rencontrent."

À quoi ressemble donc cette Bulles de Syrah ?

La robe est  "or rose" (spéciale dédicace à Jeff Carrel dont c'est la couleur préférée), avec de fines bulles éparses.

Le nez est très expressif sur la pêche de vigne, la framboise, la brioche fraîche, les épices (poivre blanc).

La bouche de belle ampleur, douce et fraîche à la fois, avec ce qu'il faut de vinosité et  une pétillance discrète mais tonique qui vous caresse le palais, relevée par une fine amertume.

La finale gourmande est bien épicée, évoquant les rosés à base de Syrah.

Franchement, c'est une très belle réussite.  Cette bulle dépasse en qualité un nombre considérable de champagnes. Elle ira aussi bien à l'apéro qu'avec des plats épicés, voire un dessert aux fruits.


vendredi 9 août 2013

Les terrasses de Gabrielle : des nouveaux vins dans votre playlist !


Tout commence par un mail qui nous est parvenu il y a quelques mois : un vigneron nous proposait un vin du Languedoc 100 % Nielluccio. Typiquement le genre de cuvée qui nous interpelle. Nous lui faisons connaître notre intérêt pour ce vin. Tant qu'il y est, il peut nous envoyer des échantillons du reste de sa production, histoire de voir si d'autres cuvées peuvent nous intéresser. On les reçoit, on goûte, on aime. Particulièrement ce Nielluccio nommé Pour une poignée de raisins.


C'est fruité et floral, très fin, avec une bouche ronde et soyeuse, étirée par une acidité évoquant les vins toscans à base du même cépage (Nielluccio = Sangiovese). Et c'est un superbe rapport qualité/prix puisque nous pouvons vous le vendre pour une poignée d'euros : cinq et demi, précisément.


Du coup, ce domaine est inscrit dans la mini-tournée languedocienne avec le Champ des Soeurs, le Mas des Caprices, le Vignoble de Gaïa et le Clos de Gravillas. Son nom ? Les terrasses de Gabrielle. Contrairement aux apparences, Olivier Pascal n'est pas fan de Johnnny. Il lui préfère Gainsbourg, Bashung et J.J. Cale qui nous a accompagné durant notre périple viticole (en hommage à sa mort toute récente). En fait, Gabrielle est le nom de sa grand-mère ... et de sa fille. 


J'arrive à Capestang sur le coup de 15h30 en provenance du Clos de Gravillas. Je fais connaissance avec Olivier et sa compagne, Fabienne Los Huertos. Deux verres d'eau bien fraîche plus tard, je pars avec Olivier pour une balade dont je n'imagine pas qu'elle durera aussi longtemps. Nous allons d'abord voir les vignes les plus proches de la maison, dédiées aux IGP Pays d'OC. Une partie de cette production part encore en coopérative. Olivier ne garde que les raisins qui lui plaisent pour les vinifier. Comme le Nielluccio  en photo ci-dessus. Parfois le Petit Verdot (mais pas en 2012). Devraient suivre prochainement années de la Counoise, et beaucoup plus rare, du Braquet (le cépage rouge de Bellet). Il a eu du mal à l'obtenir, mais finalement, un producteur à bien voulu lui donner des bois qu'il a fait greffer par un pépiniériste local.


Et le voilà planté. Comme vous voyez, il faudra attendre quelques années pour boire une cuvée 100 % Braquet (mais Olivier a déjà trouvé son nom...). Dans ces vignes "Pays d'Oc", on trouve aussi du Cinsault, de la Syrah, du Merlot, du Cabernet-Franc, du Vermentino, du Chenin, du Viognier, de la Roussanne, du Grenache blanc... Et j'ai dû en oublier un ou deux ;-)


Direction l'appellation Saint-Chinan-Berlou, maintenant. Alors que les vignes précédentes sont avant tout un héritage familial, Olivier a acheté ces parcelles petit à petit, au fil des opportunités. Il a commencé à acheté 2.5 ha à un vigneron à la retraite qui a vendu son domaine en plusieurs lots. Eloignées de tout, difficile d'accès, ces parcelles n'avaient pas intéressé grand monde. Du coup, il a pu les acheter à un prix plus que correct. 

Olivier se gare en pleine forêt. Je ne vois aucune vigne aux alentours. Le mystère plane. Pas très longtemps. Après avoir parcouru une centaine de mètres ... des vignes pointent leur nez ! Des jeunes vignes de Mourvèdre, si je me souviens bien.


Selon les parcelles, les schistes sont plus ou moins présents. Parfois, c'est vraiment très caillouteux. On se demande comment la vigne pousse dans ce désert de pierres.


On retrouve ici pas mal de cépages : Carignan, Syrah, Mourvèdre, Grenache noir et blanc, Lledoner Pelut ("cousin" du Grenache noir) Roussanne ... mais aussi des invités inattendus : Chenin et Viognier. Ce dernier est planté à 8770 pieds par hectare. Ce qui donne des petites grappes adorables.


La récompense pour la dureté du travail, c'est tout de même une vue absolument superbe, avec au milieu cette montagne plate, le Caroux, que les locaux appellent "la femme couchée". Allez un gros plan sur celle-ci, car j'ai pitié de vous, bande de petits coquins ;-)


Oui, ils ont beaucoup d'imagination, dans le secteur...


L'air de rien, cette balade de parcelles en parcelles a duré plus de deux heures... Nous redescendons vers Capestang pour visiter le chai, situé à quelques centaines de mètres de la maison. 



On peut dire sans conteste que le domaine produit des vins de garage, car le local fait à peine 50 m², avec des cuves occupant 80 % de l'espace. Et il y en a même à l'extérieur, car il n'y a pas assez de place pour toutes les contenir. Olivier ne s'est lancé dans les vinifications que depuis 2008 (il livrait avant tout à la coop) et il a des moyens limités. La qualité de ses vins me parait d'autant plus impressionnante.


A 100 m de là, un grand trou est creusé pour abriter le nouveau chai. Mais il faudra attendre que les sous rentrent un peu pour le construire...


Retour à la maison où je suis invité à dîner. Nous attaquons avec des Rieslings de l'Oregon. Non, ils n'en vendent pas au Carrefour Market de Capestang. Non Olivier n'a pas fait un voyage d'études dans l'Oregon offert par Monsanto. Ces bouteilles ont été ouvertes par Jancis Robinson qui possède une maison dans le secteur. Après les avoir dégustées, elle les a offertes à un voisin, ami d'Olivier. Étonnant, non ? Eh bien, elles étaient très bonnes, sur un équlilbre mosellan (7 ° d'alcool + sucres résiduels), avec des arômes de chèvrefeuille et d'agrumes exotiques (yuzu, combava...)


Pour le manger, c'est plus local : tielles sétoises et feuilletés aux anchois. Avec cela, je découvre le rosé du domaine, le bien nommé "Summer of love", 100 % Nielluccio lui zossi.


Ben, il est super sympa, avec du fruit, plein d'épices et de la fraîcheur à revendre... mais il n'y en a plus un seul en stock ! Va falloir qu'on en réserve sur le prochain millésime...


Nous poursuivons avec un très bon taboulé et des rafraîchissants melons. Le rosé fait toujours bien son office.

Par contre, sur les tagliatelles au saumon, nous passons au Saint-Chinian blanc : 12 de la noche en la habana (titre d'une chanson de Manu Chao), un assemblage de Roussanne et de Grenache blanc, partiellement élevé en barriques. Le 2011 est épuisé, et le 2012 pas encore embouteillé, mais nous en achèterons, car c'est vraiment très bien, à la fois opulent et tendu, incisif (merci le schiste !). Il se marie très bien avec les pâtes. 


Je découvre ensuite le "petit" Saint-Chinian du domaine, Un jour au cirque 2010 (extrait d'une chanson de Bashung "Un jour au cirque, un autre a cherché à te plaire, dresseur de loulous...). Un assemblage de Grenache, Mourvèdre et Carignan. Le nez est méga-schiste, sur des notes fumées/laurier/pierre chauffée au soleil. En bouche, c'est fin, fondu, avec des tanins soyeux, glissants. Un vin qui sera parfait avec de l'agneau rosé avec des herbes de provence/garrigue (6.50 €).


Je n'ai pas regoûté Et moi, et moi et moi 2009,  (chanson de Dutronc) car nous l'avions eu en échantillon. C'est lui qui contient le fameux Lledoner Pelut, complété par du Mourvèdre et de la Syrah. Plus dense et épicé que le précédent, il garde néanmoins une belle tension.


Je suis parti à 21h passé... et arrivé très très tard tôt à Limoges. Mais non, je ne regrette rien.
(ben v'là que je me mets à utiliser aussi des titres de chanson...)

Merci à Fabienne et Olivier pour leur très sympathique accueil !

jeudi 8 août 2013

Mas des Caprices : superbe balade suivie d'une belle dégustation


Ma première rencontre avec Mireille et Pierre Mann remonte à janvier dernier. J'avais été invité par le Syndicat des producteurs de Fitou pour une visite approfondie de l'appellation. Lors du premier soir, j'avais fait la connaissance de Mireille et d'une bonne partie de ses vins (que j'avais beaucoup appréciés). Et le lendemain, celle de Pierre et des cuvées en cours d'élevage. Nous étions alors monté sur le plateau de Leucate où se situe une bonne partie de leurs vignes, mais le temps était gris et brumeux : on ne voyait rien à dix mètres...


Là, nous sommes le 5 août, le temps est superbe. Je vais enfin pouvoir apprécier le plateau de Leucate à sa juste valeur...  Pour ceux qui n'auront pas eu la curiosité d'aller voir mes articles précédents, je résume : Pierre et Mireille étaient restaurateurs à Katzenthal. Tous les deux sont enfants de vignerons, et ils commencent à envisager à changer de vie. Ils s'essaient d'abord à la Provence, où ils trouvent les gens froids, pour finir par atterrir à Leucate, avec des habitants beaucoup plus accueillants. N'ayant pas de matériel de chai, leur vin est vinifié dans un premier temps à la cave coop. Ils en profitent pour passer en bio. En 2009, lorsqu'ils obtiennent le label AB, ils prennent leur indépendance : le Mas des Caprices voit le jour !


Pierre me sert de guide sur ce plateau situé entre la mer et l'étang de Leucate. Si le versant côté village est recouvert de villas résidentielles, le plateau lui-même est vierge de toute construction, étant sous le régime du conservatoire du littoral. Il y pousse naturellement du thym, du ciste, du lavandin et des petits chardons.


La roche calcaire est souvent affleurante, et très dure. Autant dire que si vous voulez planter quelque chose, il faut la barre à mines... ou la dynamite ;-) Et puis, ici et là, il y a des zones un peu moins hostiles, où la vigne peut se faire une place.


Après 10 minutes de marche, nous arrivons à une première parcelle du Mas des caprices : des vieilles vignes de grenache plantées "en carré" de 1.70 m sur 1.70m, ce qui permet de les labourer dans les deux sens.


Certains vieux ceps ont des "troncs" magnifiques :


Comme on le voit, le sol est jonché de cailloux calcaires. Sinon, il est plutôt sableux.


Juste à côté, une nouvelle plantation, dans un sol au calcaire plus friable 


Elle a été planté à 2 m sur 1m (pas de croisement possible, donc). Les caches servent à protéger les jeunes feuilles d'un soleil trop ardent, mais aussi des lapins qui adorent ça !


Bizarrement, la loi de la gravité ne s'applique pas dans les vignes. Les grosses pierres au lieu de s'enfoncer profondément dans le sol remontent à la surface. Dès que Pierre en voit une, de pierre, il l'ajoute aux murets environnants, car la charrue ne les apprécie guère...


HEU-REUX !


Une vue sur la falaise où se tient le sémaphore permet de voir les multiples couches géologiques.


Retour au chai-boutique du centre de Leucate pour (re)découvrir les différentes cuvées


Blanc de l'Oeuf 2012 : Grenache blanc (calcaire et schistes), Macabeu (calcaire), Carignan blanc (calcaire) et une pointe – 3 % –de Muscat (schistes). Le tout vinifié et élevé six mois dans une cuve béton ovoïde. Celle-ci favorise la remise en suspension naturelle des lies en créant un vortex. Ce qui fait qu'il gagne une belle rondeur au fil du temps (je l'avais bu en janvier, c'était beaucoup plus tendu). Mis en bouteille il y a maintenant plusieurs mois, il s'est bien fait à son nouveau contenant, en gagnant en gourmandise. Bref, c'est rond, frais, gourmand, finement floral, d"une grande digestibilité. Loin du cliché des blancs du Sud.


Ozé 2012 : composé de Grenache noir (calcaire) et de Mourvèdre (schistes), ce rosé est vinifié comme un blanc : uniquement pressurage direct, travaillé sur lie. Avec fin de fermentation commune pour les deux cépages. Puis élevé sur lie environ 6 mois, avec quelques batonnages, avant d'être mis en bouteille. Un vin pensé pour accompagner un steack de thon, des calamars, des rougets grillés... La bouche est à la fois ronde  et très tendue, avec beaucoup de droiture. Le Mourvèdre se rappelle à nous en finale avec un côté très épicé. Le calcaire aussi, avec une jolie mâche. Un très zoli rOzé ! 


Muscat 2012 : je ne suis pas trop Muscat sec, mais alors celui-là est sacrément bon ! Déjà, le nez séduit sans trop en rajouter. C'est bien mûr avec le côté fumé du schiste. En bouche, c'est fin et super tendu, très net, avec une finale intense, ni lourde ni alcooleuse. Devrait servir de mètre-étalon à tous les Muscats secs !


Rouge À Siroter 2012 :  nez un peu réduit, mais en s'aérant, il prend de jolis arômes floraux (violette) et de fruits mûrs (fraise, framboise). Assemblage de Grenache, Carignan et Mourvèdre, provenant d'une zone sableuse du plateau. Les trois sont vendangés en 8 jours : d'abord le Grenache, puis trois jours plus tard, le Carignan, juste mûr, et enfin le Mourvèdre, à la limite de la verdeur (10.5 °-11° !). Tout est entonné dans la même cuve au fur et à mesure (le Mourvèdre n'y restera que deux jours) pour être décuvé à la densité 1040-1050. Le moût est ensuite travaillé à 17-18 ° C comme un blanc ou un rosé. Si le vin est très souple, gourmand à souhait, se prêtant à être bu bien frais, la finale est sacrément épicée (1/3 de Mourvèdre). Le vin de soif par excellence, allant aussi bien avec une grillade, une pizza, des cochonnailles... Mais même si c'est difficile de ne pas boire tout son stock dans l'année, il gagnerait peut-être à vieillir quelques années, créant de belle surprises (j'imagine bien le côté floral /épicé se développer...)


Oufti 2011 : c'est en faisant des salons du côté de Liège que nos vignerons ont entendu cette expression locale .. et anagramme de Fitou. Même cépage que le vin précédent avec des proportions légèrement différentes : 40 % Grenache, 40 % Mourvèdre et 20 % Carignan (tous de la falaise calcaire), vendangés séparément, vinifiés à part. Les vins de goutte sont rassemblés et élevés en cuve béton, les vins de presse sont affinés en barriques de 7-8 vins. Le nez est sur les fruits noirs bien mûrs (cerise Burlat), les épices et le cacao. La bouche est ronde, charnue, assez dense, bien construite, avec une belle mâche épicée en fin de bouche. 

Même s'il est très bien équilibré, le 2011 est plutôt solaire. Le 2012 également dégusté sera plus frais et  super gourmand. Une tuerie ... mais il faudra d'abord acheter les 2011 !...


Retour Aux Sources 2010 : la première cuvée vinifiée du domaine. Les clients demandait s'il restait du R.A.S. Du coup, les Mann se sont pris au jeu et ont alors inventé la deuxième cuvée R.A.S avec Rouge À Siroter. L'assemblage est différent : 50 % de Carignan, 30 % de Grenache et 20 % de Syrah (tout sur schistes). Elevage à 2/3 en cuves béton, et le reste en vieilles barriques. Le résultat ? Oufti, c'est super bon ! Plus dense qu'Oufti mais avec de la tension et de la fraîcheur. Avec une rétro superbe et tonique. C'est classieux, équilibré, difficile à placer en Fitou !

Le Retour 2012 également dégusté a été élaboré très différemment, avec une utilisation partielle de grappes non éraflées, placées en "millefeuille" dans la cuve.  C'est plus léger et fin, avec une fraîcheur végétale plus marquée. Perso, je préfère la version 2010. 


Anthocyane 2010 :  ce sont les vieilles vignes du domaine qui approvisionnent ce vin. 50 % de Mourvèdre de la falaise, 40 % de Carignan du bord de mer et 10 % de Grenache. Elevage long en demi-muids et en barrique. Ce vin est plus concentré que les précédents, avec un boisé très bien fondu, mais en même temps frais et séveux. 

Anthocyane 2009 : un peu plus évolué que le précédent, avec un fruit plus mûr et un élevage plus marqué. J'évoque le Clos des Fées pour le style. Bien vu : les barriques Saury contenaient en 2008 ... du Clos des Fées ! Y a pas de hasard ;-) 

Anthocyane 2012 (élevé en foudre) :  matière plus fine, déliée, avec un nez très délicat. Superbe !


Confusion 2011 : un vin un peu ambivalent, entre masculin et féminin. Ca ressemble à un Grenache noir muté, sauf qu'il ne l'est pas, et qu'il ne contient que quelques grammes de sucres résiduels. Mais sinon, au nez, on s'y croirait vraiment, sur la cerise et le cacao, les épices. En bouche, la matière est douce, sensuelle, sans finale sucrée ou alcooleuse, mais au contraire fraîche et épicée (partiellement non éraflé). Ce qui permet de le placer facilement sur des plats salés. Genre un pavé de biche avec une sauce légèrement chocolatée, et une touche de cerise acide (ou d'airelles).


Grenat'in : un collector ! C'est en fait une petite saignée de la cuvée Grenat (qui va suivre) afin de la concentrer un peu. Elle aussi est mutée, mais avec une couleur rose "framboise". Au nez et en bouche, on retrouve aussi la framboise, mais pas que... C'est un véritable panier de fruits rouges, avec une fraîcheur tonique, une gourmandise incroyable. Une petite tuerie (pour l'instant, on n'en a pas ... mais ça ne devrait pas durer...)


Grenat 2011 : ce coup-ci, c'est un vrai Grenat de Rivesaltes (muté, donc). La robe est noire, dense. La matière est veloutée à souhait, très crème de fruits noirs + cacao. Même s'il y a 100 g de sucres résiduels, ils sont très discrets, tout comme l'alcool. Lui aussi autorise les mariages sucrés/salés, même si c'est une évidence avec un dessert au chocolat. Un excellent rapport qualité/prix (10 € les 50 cl).


Merci à Mireille et Pierre pour ces deux heures de pur bonheur !